Histoire sans Nom
Le bonheur est l’apanage des cons et l’optimisme celui des ignorants.
Mais quand on détonne et qu’on cultive allègrement la marginalité, la moindre des politesses est de faire croire qu’on en est heureuse. Il n’y a rien de plus chiant qu’une contestataire maussade. Et puis avec une telle opinion de sa personne, elle se doit de tout faire avec panache. Il faut voir grand.
Notre protagoniste est douée de nombreux pouvoirs mais ces derniers ne lui permettent pas d’opérer un génocide pour éradiquer le reste de l’humanité. Ainsi en comprenant qu’elle va devoir vivre au sein d’une communauté elle a décidé depuis longtemps de sourire et d’être aimable, même avec les plus gros mongolitos de la planète. Au moins comme ça on lui fout la paix.
Elle voue un culte aux fringues. Elle voue un culte aux cuissardes, chaussures à talons indécents, Rangers et Doc Marten’s. Elle idolâtre les robes noires moulantes et de temps en temps se permet du rouge aux lèvres. La dentelle est ce qu’il y a de plus joli sur Terre et le velours une des matières les plus agréable à porter.
Non pas qu’elle soit une fashion-victim – Elle a une sainte horreur de la mode – mais cultive son style légèrement fétichiste. Ce qui attire de façon récurrente tous les pervers de la Capitale.
Il serait facile de la traiter de gothique mais au fond, elle n’a jamais su si elle était goth ou pas goth. Et puis quand bien même, le plus beau des snobismes concernant le gothisme est de dire que l’on ne l’est pas.
C’est la première fois de son existence qu’elle
se sent atrocement parisienne. Une espèce de provocation mesquine face à l’ensemble des autres « petite gens » de la banlieue, un gros « je vous emmerde je me suis barrée de
votre merde et je peux aller à mon boulot à pied sans prendre le RER » Elle est fière de ne plus faire partie du troupeau. Moutons plus vraiment blanc ni franchement noir, juste des moutons ayant hérités d'une
laine peroxydée lissée ou de faux-Gucci « bling-bling » fana de la consommation oblige « parce qu'ils le valent bien ».
Sur les Grands Boulevards, nous pouvons voir notre douce rebelle qui avance à grand pas, engoncée dans une tenue pêchée sur le catalogue des Trois-Suisses et des espèces de chaussures ballerines qu’elle a pu voir aux pieds de différentes personnes croisées dans le monde du travail.
Elle se sent ridicule mais après tout, elle se doit de tenir le rôle de la parfaite jeune fille qui vient de se faire embaucher. Rebelle mais pas folle.